Développement économique communautaire (DÉC) aux Philippines

Le tournant d’ Agri-Aqua Development Coalition : Mindanao

Yvon Poirier, June 2006

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Constituée en 1994 par 120 organisations populaires et coopératives de l’Île de Mindanao, la Coalition de Développement Agri-Aqua (AADC) est issue du Congrès du Peuple pour la Réforme Agraire. Son objectif est de bâtir une coalition paysanne sur les principes de décisions consensuelles, d’action collective et d’unité fondée sur la solidarité. Depuis 2002, AADC a décidé que ses activités de développement économique communautaire (DÉC) seront la pierre d’angle de son organisation communautaire afin de répondre au déclin de l’agriculture et de la pêche dans le sud des Philippines. En effet, la détérioration des revenus agricoles et de la pêche, accroît davantage la pauvreté des populations locales. Depuis cette date, l’AADC orchestre l’interaction entre les unités de gouvernement local (UGL), les organisations populaires (OP) organisées en coalitions locales (CL) et le secteur privé pour développer l’économie locale de façon plus durable, améliorer la qualité de vie des pauvres du milieu rural et augmenter la cohésion sociale de la communauté.

L’organisation d’entreprenariat communautaire (OEC) est au coeur de l’activité du DÉC. Elle prépare les pauvres qui se sont organisés à s’impliquer dans le développement économique local et à réclamer leur juste part des fruits du développement de l’économie locale. Le travail d’OEC est articulé en quatre phases :

  • La préparation sociale des organisations populaires locales car le passage à des activités d’entreprenariat est un changement de paradigme.

  • La réorganisation coopérative pour plus d’efficacité professionnelle dans les activités économiques.

  • La mise au point d’un plan d’affaires et son opérationnalisation : identifier les opportunités d’affaires, les mettre en marche, en partenariat avec les UGL.

  • Le réseautage et le partenariat de la coopérative avec le milieu des affaires est la dernière étape du processus. Autant que possible, des contrats sont signés entre la coopérative et les entreprises de transformation ou de mise en marché. À titre d’exemple, une coopérative, constituée de producteurs de caoutchouc, a obtenu un prix nettement meilleur que chaque producteur individuellement. Avec internet, la coopérative est en mesure de connaître les prix mondiaux et la négociation des prix est ainsi plus équilibrée.

« Les résultats confirment que dans les zones rurales en progression, trois facteurs interviennent : une culture de participation dans les organisations locales, des entreprises dont la propriété est locale et le développement d’une classe moyenne. Le travail d’OEC aide les pauvres à se doter de coopératives et fait la promotion de l’entreprenariat comme stratégie pour le développement économique local ».

L’AADC résume ainsi le sens qu’elle donne à son action : « Le but de l’OEC est d’augmenter le capital financier, humain et social des pauvres, afin qu’ils puissent être partie prenante de la vie économique courante. On ne peut se fier aux seules forces du marché pour que le développement bénéficie aux pauvres. Les forces sociales entrent en jeu à travers la construction du capital social. En tant qu’organisation intermédiaire, l’AADC ne fait pas que faciliter les relations pour l’obtention de ressources pour la réussite et le développement des affaires des coopératives, elle construit des relations solidaires en profondeur parmi la population locale, permettant ainsi l’essor des communautés. Lorsque cela se produit, le bien-être général de la population, incluant les pauvres, est réalisé.

Idéologie

La terre au laboureur. L’eau municipale exclusivement pour les pêcheurs marginaux. Un environnement propre et vert pour les générations futures. La représentation pour les sous-représentés. L’auto-détermination pour les peuples indigènes. Des opportunités égales pour les hommes et les femmes ?

Éthique

Le travail quotidien d’Agri-Aqua se nourrit de croyances profondes.

1. Le pouvoir provient de la solidarité et de la confiance mutuelle entre ses membres.

2. L’action collective permet à la communauté de s’approcher de ses objectifs de développement.

3. La participation est un exercice de capacitation (empowerment) de la population.

4. La générosité est un chemin durable vers la rectitude et la pureté.

Au dessus de tout, les valeurs suprêmes sont l’amour et la foi, dont l’influence allège les fardeaux de la pauvreté ».

Sources :

Bulletin international de développement local durable